La poussée inflationniste aidant, se repose le problème de la taxation éventuelle des superprofits réalisés par certaines entreprises du secteur énergétique par exemple.
Ainsi Total Energies a engrangé en 2021 un bénéfice gigantesque de 16 milliards de dollars en profitant de la forte hausse des hydrocarbures et le bénéfice net du Groupe a atteint 18.1 milliards de dollars contre 4.4 milliards l’année précédente.
L’Etat hésite entre des décisions contradictoires :
- Faut-il surtaxer ces superprofits en vertu de l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen instaurant la progressivité de l’impôt, partie intégrante de notre Constitution ?
- Ne risque-t-on pas en raison du manque de stabilité fiscale qui règne trop souvent chez nous de décourager des investisseurs étrangers envisageant de s’installer en France ?
- Peut-on au pays de l’Egalité tolérer que les classes moyennes paient proportionnellement beaucoup plus d’impôts que les classes les plus aisées (les plus pauvres n’en paient pas ou peu) ?
- Acceptera -t-on indéfiniment que des sociétés étrangères (Google par exemple) exerçant des activités sur notre territoire échappent totalement ou presque à l’imposition en France grâce à des montages fiscaux où même des pays de l’UE (Irlande : IS à 12.5%, Luxembourg : IS de 15 à 17% France : IS à 26.5%) pratiquent un véritable dumping fiscal ?
Il serait pourtant facile d’appliquer une règle que les Etats-Unis pratiquent déjà pour leurs ressortissants :
- Si vous êtes fiscalisé aux USA : payez les impôts dont vous êtes redevables
- Si vous êtes fiscalisé hors des USA : payez aux USA les impôts que vous auriez dû payer si vous y aviez bénéficié du même revenu diminué de ceux payés à l’étranger pour les activités que vous y avez déployées.
Autrement dit pour les Américains :
Aucun intérêt fiscal à travailler à l’étranger. Si vous vous y installez ce sera pour d’autres raisons notamment commerciales
Intérêt fiscal en revanche de rester aux USA si l’impôt dû à l’étranger est supérieur à l’impôt dû aux USA car le Trésor américain ne vous remboursera pas la différence
Il y a bien sûr des échappatoires par le biais notamment de conventions internationales évitant dans certains domaines les doubles impositions
Mais la règle la plus légitime est la territorialité de l’impôt. Autrement dit : si vous bénéficiez des avantages d’un pays vous devez contribuer aux dépenses de ce pays comme n’importe quel autre contribuable.
Si on appliquait cette règle sur le CA réalisé en France par chaque société, française ou étrangère, personne n’aurait plus intérêt à utiliser les finesses, pour ne pas dire les facéties, de fiscalistes pour « optimiser » ses paiements d’impôts
Si on appliquait aux grandes entreprises françaises le même barème que celui qui aurait été le leur si elles avaient été américaines, quitte à revoir progressivement nos taux à la baisse pour les harmoniser à ceux de nos concurrents on ne se poserait pas non plus la question.
Si l’Europe prônait sa mondialisation heureuse comme le temple d’une concurrence fiscalement, socialement, environnementalement équilibrée, on ne constaterait pas au sein de l’Union des différences centrifuges qui si elles persistent risquent de la faire éclater
Pierre Chastanier